⠀ Qu’en dis-tu, voyageur, des pays et des gares ? Du moins as-tu cueilli l’ennui, puisqu’il est mûr, Toi que voilà fumant de maussades cigares, Noir, projetant une ombre absurde sur le mur ? Tes yeux sont aussi morts depuis les aventures, Ta grimace est la même et ton deuil est pareil : Telle la lune vue à travers des mâtures, Telle la vieille mer sous le jeune soleil, Tel l’ancien cimetière aux tombes toujours neuves ! Mais voyons, et dis-nous les récits devinés, Ces désillusions pleurant le long des fleuves, Ces dégoûts comme autant de fades nouveau-nés, Ces femmes ! Dis les gaz, et l’horreur identique Du mal toujours, du laid partout sur tes chemins, Et dis l’Amour et dis encor la Politique Avec du sang déshonoré d’encre à leurs mains. Et puis surtout ne va pas t’oublier toi-même Traînassant ta faiblesse et ta simplicité Partout où l’on bataille et partout où l’on aime, D’une façon si triste et folle, en vérité ! A-t-on assez puni cette lourde innocence ? Qu’en dis-tu ?